L’article a été publié le 28 avril 2020 sur le site de l’Institut Arctique. Ce centre est dédié aux études liées à la sécurité du Cercle polaire arctique. Ses travaux de recherche s’intéressent aux problématiques régionales dans les domaines militaires, économiques, socio-politiques, culturels et environnementaux.
Cette analyse est rédigée par Marc Lanteigne, professeur de Sciences politiques associé à l’Université de Tromsø en Norvège. Il est également l’auteur du blog Over the Circle qui étudie l’actualité géopolitique de la région polaire.
L’auteur aborde le développement de la diplomatie chinoise en Arctique. Il explique notamment les leviers de construction de son identité dans la région. Pointant les enjeux économiques et l’émergence de risques nouveaux, cet article explique comment le Cercle polaire Arctique est devenu une nouvelle zone d’influence de la Chine.
Après un premier refus en 2009, la Chine a intégré en 2013 le Conseil de l’Arctique avec quatre autres pays d’Asie Pacifique (le Japon, l’Inde, Singapour et la Corée du Sud). En dépit d’un manque manifeste en matière d’exploration polaire, ces nouveaux entrants ont proposé des investissements économiques massifs afin de faire avancer la recherche scientifique sur les thématiques arctiques. C’est de cette façon qu’ils ont apporté leur contribution aux réflexions du Conseil. Dès lors, les intérêts chinois pour cette zone n’ont cessé de croître. C’est ainsi qu’est née la diplomatie chinoise de l’Arctique.
I. Légitimité de la Chine au sein du cercle polaire
Pour la Chine, le premier enjeu de cette stratégie était de se faire accepter comme un acteur régional légitime. Le développement de l’identité arctique de la Chine a commencé difficilement. En effet, d’un point de vue géographique, le pays est très éloigné de la région. Son point le plus au Nord est situé à 1400 km des franges sud du cercle polaire. De plus, la Chine ne dispose d’aucun territoire dans la zone. Elle est néanmoins parvenue à construire son identité en Arctique en entretenant des relations multilatérales. Elles ont ainsi renforcé la perception que la Chine est un acteur majeur en matière de développement régional. Petit à petit, Pékin a inclus l’Arctique dans son grand projet des « Nouvelles routes de la soie » tout en mettant en avant ses ambitions de « Routes de la soie polaires ». Elle développe par la même occasion le concept du « proche-Arctique ».
II. Pluralité et diversité des partenariats chinois
Afin de mieux comprendre la construction de l’identité chinoise en Arctique, l’auteur examine les relations multilatérales de la diplomatie de Beijing. Il note le rôle prépondérant de la Chine au sein du Conseil de l’Arctique et rappelle qu’elle ne dispose que d’un statut d’observateur. Tout d’abord, Pékin noue des partenariats avec les gouvernements de la zone polaire. Ces liens sont les plus étroits avec la Russie en raison du projet des « Routes de la soie polaires ». De plus, la Chine créé des partenariats bilatéraux avec la Finlande et l’Islande. Au-delà de ces relations gouvernementales, elle établit des interactions avec des acteurs non-étatiques notamment scientifiques et académiques. Une délégation chinoise est systématiquement présente aux conférences des think tank internationaux «Arctic Circle», «Arctic Frontiers» et «Arctic: territoriy of dialogue». La Chine s’apprête également à dynamiser son propre think tank en la matière par le biais du Centre de Recherche chinois sur l’Arctique.
Cette affirmation identitaire de la Chine en Arctique fait naître des rivalités. L’auteur cible en particulier les interrogations de puissances occidentales telles que les États-Unis par exemple. En dépit de son statut d’observateur, la Chine s’est créé en moins d’une décennie une identité dans le cercle polaire Arctique. Celle-ci la place désormais comme un acteur prépondérant dans une zone pourtant éloignée de son territoire national.